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HcoM, le Blog...

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Blog de communication à l'attention de ceux - professionnels ou non et étudiants - qui sont intéressés par la Communication au sens large


Dossier - Journalistes belges et réseaux sociaux

Publié par Olivier Moch sur 17 Septembre 2015, 08:31am

Catégories : #Presse écrite et audivisuelle

Dossier - Journalistes belges et réseaux sociaux

Les réseaux sociaux font-ils partie de la profession de journalistes ? Comment ceux-ci les utilisent-ils ? Sont-ils des boosteurs de réactivité par rapport à l’info ? Communication est parti à la rencontre de quelques journalistes pour connaitre leur usage des réseaux sociaux…

Une récente étude française(1) montre que 91% des journalistes français sont présents sur les réseaux sociaux et les utilisent dans le cadre de leur métier. Quatre sur dix y passent même plus de deux heures chaque jour et leurs réseaux privilégiés sont, dans l’ordre, Twitter, Facebook et LinkedIn.

Selon cette étude les journalistes qui utilisent les réseaux :

- estiment que leur réactivité s'est améliorée (pour 70% d'entre-eux);
- pensent que leur productivité s'est améliorée (pour 37%) ;
- s'en servent pour partager leurs propres articles (64%) ;
- les utilisent pour créer une veille sur les sujets qui les intéressent (55%) ;
- s'en servent pour développer leur personal branding (47%).

De plus en plus, les réseaux sociaux constituent un accès à l’information, les médias traditionnels l’ont bien compris n’hésitant pas à diffuser leurs articles et reportages par ces canaux afin de toucher un public bien plus vaste. Selon une autre étude(2) – américaine celle-là – 70% de la population en ligne consultent Twitter pour être informé en temps réel.

Les journalistes français font donc un usage professionnel régulier des réseaux sociaux. Communication a voulu aller à la rencontre de quelques journalistes belges pour connaitre leur position vis-à-vis des réseaux sociaux mais aussi l’utilisation qu’ils en font. Rencontre avec trois journalistes(3) : Olivier Badart (RTBF, présent sur Facebook et Twitter), Alain Wagener (RTC, présent sur Twitter, Facebook, LinkedIn et dans une moindre mesure Instagram) et Benjamin Herman (L’avenir, présent sur Facebook et Twitter et, dans une moindre mesure sur LinkedIn et Instagram).

1° Quelle utilisation pour les journalistes ?

Olivier Badart : Twitter est l'outil de liaison avec les téléspectateurs choisi par la RTBF. Les comptes personnels et des émissions nous permettent de teaser mais surtout de dialoguer en direct avec les téléspectateurs lors des diffusions de nos reportages. C'est une obligation ! Nous avons reçu une formation pour interagir en direct et nous sommes en ligne avec le social éditor de la RTBF qui a bossé en amont. Par exemple, il donne les chiffres en direct entendus dans l'émission ou a préparé des synthèses, des rappels… Pareillement, Facebook permet de teaser en premier, de diffuser un extrait du reportage mais aussi de lancer des appels à témoignages, d'assurer le suivi des reportages, des demandes, de sonder le seuil de satisfaction. Facebook nous permet aussi de suivre l'actu et d'espionner les autres.

Alain Wagener : les réseaux sociaux constituent des outils de diffusion d’informations, de veille d’actualité, de prise de contact avec des interlocuteurs nécessaires au travail, de multiplication rapide des sources … ils permettent aussi d’annuler la notion de frontières, tant en info entrante que sortante (moins important pour le journaliste «local» que je suis même si on sait qu’on est suivi par des «locaux» expatriés ; essentiel pour le blogueur que je suis aussi). Ils sont aussi des outils que chacun s’est appropriés, des canaux prioritaires voire exclusifs dans la consommation d’infos que font certaines tranches de la population (les jeunes par exemple), en tant qu’observateurs du quotidien, on ne peut ignorer cela et vivre en dehors.

Pour moi, Twitter est une source de diffusion et de promotion de mon travail mais aussi un outil de contact avec d’autres Twittos pertinents pour mon travail ou encore un outil de veille d’actualité que l’on peut cibler tant par les comptes que l’on suit que par des recherches sur mot-clés. Facebook est un important canal de diffusion de mon travail et une source rapide (c’est important) pour obtenir une info, un contact, une précision, en avant tout sollicitant le réseau via des «bouteilles à la mer» (par exemple «quelqu’un connaîtrait-il une personne qui va vendre du muguet le long d’une route ?» est le genre de bouteille qu’on peut lâcher et Facebook apportera sans doute une réponse utile). LinkedIn me permet de constituer un réseau qui pourrait m’être utile (comme tout réseau), m’offre lui aussi un espace de diffusion de mon travail et, en fonction des membres du réseau et des groupes auquel je suis inscrit, me donne aussi des sources d’informations qui peuvent m’être utiles et donner lieu à des articles ou reportages

Benjamin Herman : Facebook est LE réseau social. Je l’utilise principalement à des fins personnelles comme la plupart des gens : profil personnel gestion de plusieurs pages et groupes pour des activités extraprofessionnelles. Mais il m’arrive cependant de l’utiliser à des fins professionnelles. Facebook me permet d’alerter sur une actualité, un phénomène, quelque chose qui se partage. Ça m’est arrivé plusieurs fois pour de magnifiques vidéos sur Liège, un reportage photographique, des exploits de Liégeois, des histoires particulières… ce sont des choses qui se partagent et que je découvre sur Facebook, je peux alors contacter les protagonistes et en faire un article. Quelques institutions communiquent aussi sur Facebook, la police de Liège par exemple. J’active alors les notifications et me tiens au courant en cas d’actualité. Facebook permet facilement de contacter les gens, c’est mon premier réflexe lorsque je dois dénicher une personne qui m’est totalement inconnue ou dont je n’ai pas les coordonnées, je lui envoie un MP sur Facebook pour qu’elle m’envoie ses cordonnées. Il m’arrive de partager des articles sur Facebook mais cela reste rare, j’aime que cela reste plus privé que professionnel. Je n’entretiens pas vraiment de contacts professionnels, je me contente de répondre favorablement aux demandes d’amis (politiques, professionnels de la communication…).

Sur Twitter, c’est plus professionnel que privé. Je ne suis pas un grand Twitto mais il m’arrive de m’en servir pour partager des articles même si cela reste anecdotique. En effet, contrairement à Facebook, Twitter provoque un très faible taux de clics sur les URL partagées. Du coup, c’est un peu de l’énergie perdue en termes de visibilité. Par contre, Twitter est surtout intéressant pour son rôle d’alerte en cas d’actualité. Il offre des informations - à prendre avec des pincettes surtout lorsque l’on est journalistes – par exemple sur un fait divers. En deux mots, je dirais donc que Facebook est le réseau social qui permet avant tout de partager des articles, de profiter de la viralité, d’asseoir la notoriété du média. Par contre, je ne m’en sers pas trop professionnellement, c’est un choix ! Le Community Manager de l’Avenir fait bien son boulot, je lui laisse ce job. Il convient de bien séparer les compétences, je suis là pour faire un boulot de journalistes, pas pour vendre les articles à tous prix. Twitter a plutôt un rôle d’alerte pour moi, mais son gros défaut est de ne concerner qu’un microcosme de journalistes et de personnalités politiques, ce n’est pas très grand public.

2° Réactivité et productivité sont-elles améliorées par les réseaux sociaux ?

Alain Wagener : Oui clairement. On a l’info bien plus vite (j’annonce souvent des infos à mon rédac' chef qui les attend toujours sur son fil Belga !) et on a aussi une diversité de sources, ce qui permet de découvrir des informations utilisables qui ne transitent pas par les canaux habituels de sources journalistiques. On peut découvrir par exemple qu’un groupe est en répétition dans sa ville parce qu’il le fait savoir via les réseaux et ça peut donner un reportage alors qu’aucun communiqué de presse, aucune conférence de presse, qu’aucun article n’a été écrit et transmis. Cela enrichit donc le travail, en tout cas sa diversité. On gagne en rapidité et en richesse potentielle de choix de sujets et de contenus

Benjamin Herman : la réactivité, oui. Ce n’est pas difficile d’en comprendre les raisons : les réseaux sociaux ont accéléré le rythme de l’info, le journaliste n’est plus à la source, il est alerté de ce qui se passe. La productivité, c’est très complexe de répondre. Je dirais qu’en termes de prise de contact avec les interlocuteurs, d’alerte, d’inspiration… c’est un plus. Par contre, les réseaux sociaux sont chronophages, ils nous détournent du terrain ce qui ne plait pas trop au journaliste que je suis. Ils sont par ailleurs une source de travail supplémentaire, une tâche qui existait moins auparavant : la certification permanente par rapport aux rumeurs. Et pseudo-articles de presse qui circulent. Les journalistes doivent confirmer ou infirmer en permanence, non pas par rapport à la réalité mais par rapport à ce qui se dit sur les réseaux sociaux. C’est une perte de temps !

Olivier Badart : la réactivité par rapport à l’info et la productivité sont-elles augmentées par l’utilisation professionnelle des réseaux sociaux ? A 100 % !!! A tous niveaux. Recoupements, précisions, infos supplémentaires, espionnage, appels à témoins. Tout est beaucoup plus rapide et le réseau permet des résultats quasi immédiats.

3° Le journalisme possible en faisant abstraction des réseaux sociaux ?

Benjamin Herman : non parce que les réseaux sociaux sont devenus importants dans la société. Le journaliste doit vivre avec les réseaux sociaux en tant que journalistes avec le recul nécessaire. Ignorer les réseaux sociaux ce serait comme ignorer les soins de santé, les transports ou l’économie : ils font partie de notre monde. Les réseaux sociaux sont tellement une source de rumeurs et de pseudo-informations que les journalistes doivent plus que jamais faire leur boulot correctement. Je dirais qu’il est important de bien avoir conscience que de ce que sont les réseaux sociaux au moment où on les utilise. Ils remplissent des fonctions diverses, il convient de jongler avec un rôle d’alerte, de prise de contact et de source d’information, un outil de diffusion, de partage d’article et un terrain d’action à part entière. Comme le palais de justice, la rue ou le conseil communal… les réseaux sociaux font partie de la société. C’est un lieu virtuel mais un lieu quand même où il se passe et se dit des choses. Ils font partie de la réalité en 2015 !

Olivier Badart : évidemment non ! C'est une source et un outil indispensable. Après, il faut pouvoir gérer. J'ai la chance de travailler dans un média qui entoure et aide beaucoup ses journalistes. Il y a donc des alertes etc... Seul, ce serait probablement plus difficile !

Alain Wagener : Sans doute oui, mais dans le cas d’exception très rares. Même le slow journalisme finit par faire connaître son travail via les amplificateurs que sont les réseaux sociaux. Ils semblent plutôt incontournables mais ce ne sont que des outils, tout performants qu’ils soient, ce n’est pas eux qui font du journalisme, c’est la femme ou l’homme qui les utilise avec son savoir-faire, sa déontologie, son expertise professionnelle. Elle est d’autant plus importante que les réseaux induisent un afflux massif et incessant d’infos qu’il faut traiter. Personnellement, je trouve qu’ils enrichissent mon travail et – ne nous en cachons pas -, dans un contexte professionnel difficile, en paupérisation, qu’ils offrent aussi une visibilité et un impact «personal branding» intéressant pour faire montre de ses compétences, de son savoir-faire, de ses centres d’intérêt…

En conclusion

Si une certaine méfiance des réseaux sociaux par rapport à l’éthique de leur profession existe certainement, les journalistes belges semblent aussi de fervents utilisateurs des réseaux sociaux dans le cadre de leur profession. Twitter et Facebook sont leurs plateformes privilégiées et les journalistes estiment que ces outils sociaux peuvent servir leur réactivité et leur productivité. Ils leur permettent même d'être meilleur dans leur job. Enfin, pour les journalistes rencontrés, il semble évident que leur métiers ne puissent plus se faire sans tenir compte des réseaux sociaux !

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(1) Journalistes & réseaux sociaux – Décryptage de leurs usages, étude Cision, (www.cision.fr) septembre 2015
(2) Twitter plus que jamais une plateforme d’information en temps réel, Pierrick Aubert, on www.zdnet.fr, 5 septembre 2015.
(3) Qu’il soit clair que ces rencontres ne constituent en aucune manière une étude scientifique mais simplement un instantané de l’utilisation des réseaux sociaux par des journalistes belges. Une dizaine de journalistes – hommes et femmes - a été contactée, seuls les trois cités ici ont répondu.

Les suivre sur les réseaux sociaux :

Olivier Badart : Twitter - Facebook

Alain Wagener : Twitter - Facebook - LinkedIn

Benjamin Herman : Twitter - Facebook

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Bonjour, afin de compléter votre propos et votre bibliographie, je me permets de faire référence à mon ouvrage publié le 1er janvier 2015, "Journalistes 2.0 : usages et dilemmes des journalistes contemporains" qui traite justement de l'utilisation des réseaux sociaux par les journalistes, les nouveaux modes d'écriture et de reporting sous-jacents comme le scrollitelling et bien sûr toutes les questions relatives à la dimension éthique et déontologique et à la la liberté d'expression individuelle. A bientôt Linda
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