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HcoM, le Blog...

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Blog de communication à l'attention de ceux - professionnels ou non et étudiants - qui sont intéressés par la Communication au sens large


La communication politique

Publié par Olivier Moch sur 23 Septembre 2012, 09:11am

Catégories : #Les bases de la Communication

La communication est un outil fondamental du jeu politique. Elle s'est développée depuis les années cinquante pour devenir un rouage incontournable de la stratégie politique.

communication-politique.jpgDans une démocratie représentative et pluraliste, c'est à dire dans laquelle le citoyen participe au processus d'élection des autorités politiques sur base d'un choix possible, la communication politique est un type de communication ciblée dont le but est de permettre à l'électeur de poser son choix mais aussi - et surtout - à favoriser l'élection d'une personne qui se présente au scrutin. Il serait, cependant, réducteur de considérer que la communication politique est juste une publicité électorale. Elle s'apparente aussi aux messages de l'autorité politique en place vers le grand public, aux échanges entre majorité et opposition ou encore à la relation du monde politique et des médias et notamment au rôle majeur joué par les médias dans la formation de l'opinion publique, à travers les sondages notamment. Le chercheur français en sciences de la communication et spécialiste de la communication politique, Dominique Wolton, définit la communication politique comme "l'espace où s'échangent les discours contradictoire des trois acteurs qui ont la légitimité à s'exprimer publiquement sur la politique et qui sont les hommes politiques, les journalistes et l'opinion publique à travers les sondages"(1). Cette vision m'apparait comme réaliste et représentative d'une communication qui repose sur les interactions entre les trois acteurs majeurs de la communication politique.

Evolution de la communication politique

L'émergence de la communication politique est intimement liée à l'évolution du pouvoir et de son exercice. Ainsi, jusqu'au Moyen-âge, la violence physique, la contrainte et la crainte sont les armes utilisées par le pouvoir en place pour se faire respecter ou pour contrer toute forme d'opposition. A partir du 17è siècle, le pouvoir s'organise et les rapports avec l'état sont moins soumis à la contrainte mais il faut attendre la Révolution Française (1789) d'abord, l'installation de la Monarchie Constitutionnelle (1791) et, surtout, la Première République (1792) annonciatrice d'une nouvelle forme d'exercice du pouvoir pour que le rôle du citoyen dans la politique se développe. La Constitution de l'An I fut adoptée, en 1793, par référendum sur base d'un électorat potentiel de sept millions de personnes(2). Ce référendum, et plus précisément toute l'information faite autour par les Députés de la Convention Nationale, pose les premiers vrais jalons de la communication politique. Elle a pris son réel essor avec l'Affaire Dreyfus, à la charnière des 19è et 20 siècles où chaque camp - dreyfusard et antidreyfusard -  a développé ses messages et leur diffusion afin de sensibiliser l'opinion publique autour d'une affaire militaire qui est rapidement devenue politique. Au 20è siècle, Franklin D. Roosevelt fut le premier à mettre en place une forme de merchandising politique et à utiliser la technique du sondage pour orienter, en 1936, sa campagne de réélection à la présidence américaine en fonction de l'opinion du public. Les Américains ont mis en place un véritable processus de communication autour du scrutin présidentiel avec l'apparition des Spin Doctors(3) dont le rôle était "de dire du bien et de faire dire du bien" de leur candidat, la captation des premiers débats radiodiffusés dans les années '50 et télévisés durant la décennie suivante. Le premier débat politique diffusé à la télévision fut celui entre Richard Nixon et John F. Kennedy, en septembre 1960(4). JFK et son entourage furent les premiers à adopter une communication plus fine, plus ciblée et plus policée envers les électeurs. Kennedy fut aussi le premier à introduire l'empathie et le sourire dans le processus de séduction de l'électorat. Les années '80 virent l'éclosion des gourous de la communication politique,  rappelons-nous du fameux "La Force Tranquille" de Jacques Séguéla pour François Mitterrand et de l'affiche qui accompagnait ce slogan, savamment étudiée pour toucher différentes catégories d'électeurs potentiels. A l'aube du 21è siècle, la communication politique s'est largement inspirée des techniques du marketing pour devenir un rouage essentiel du jeu politique...

De l'importance de la communication politique

Dans le processus démocratique, la communication politique revêt une réelle importance, elle participe à l'information du public, à son adhésion à des idées ou au rejet d'autres et à son libre-choix dans l'isoloir. Elle repose sur différents vecteurs comme les traditionnelles et séculaires rencontres sur le terrain (le serrage de mains sur les marchés), l'affichage électoral, le tractage électoral, les réunions et les meetings politiques, les débats télévisés ou non, les apparitions dans la presse, l'analyse politique, le sondage et, depuis quelques années, l'internet et ses multiples possibilités. A partir des années soixante, avec la popularisation de la télévision, aux Etats-Unis, les Communicateurs politique (ou Spin Doctors) ont commencé à organiser la communication politique, à la concevoir comme une stratégie essentielle de toute action politique. Ils ont introduit les notions d'apparence et d'image et développé les grandes messes politiques, qu'ils s'agissent de meetings partisans ou de débats télévisés. Ces rendez-vous capitaux ont été scénarisés, scénographiés et contrôlés à l'extrême pour ne rien laisser au hasard, ou si peu. Cette tendance est arrivée plus tard en Europe mais elle y est désormais tout autant présente. La Communication politique repose sur une obsession première inaliénable, faire élire son candidat. C'est la vocation majeure de cette communication, si le candidat n'est pas élu la communication politique n'a plus de raison, pour lui, d'exister. Pour parvenir à cette élection, il s'agit de travailler sur l'image de ce candidat, de le faire entrer dans la vie des citoyens. L'une des missions fondamentales de la communication politique est le fameux storytelling, cette stratégie qui consiste à raconter une histoire, l'histoire du candidat qui devra parler aux électeurs, leur évoquer des souvenirs ou leur faire prendre conscience qu'il existe de nombreux champs communs entre eux et le candidat. L'image est essentielle en politique mais elle ne peut satisfaire à elle seule à l'exigence du jeu politique, il faut en effet un discours derrière l'image et c'est encore le rôle du Communicateur politique que de fabriquer ce discours et de s'assurer de sa bonne diffusion.

La communication politique à l'heure du web 2.0

Il y a l'image, il y a les mots, il y a aussi la façon de dire les mots mais surtout la diffusion de ces images et de ces mots. A ce titre, l'éclosion du net à la fin des années nonante et l'apparition des médias sociaux au 21è siècle ont profondément remanié le jeu politique. Tous les partis politiques se sont ouverts aux nouvelles technologies pour ventiler leurs idées et tenter de fidéliser l'électorat. Individuellement, les politiciens se sont même davantage affranchis de leur parti en créant des sites internet, des blogs personnels ou en étant présents sur les réseaux sociaux. De leur côté, les citoyens se sont aussi emparés des NTIC pour se faire entendre, pour se rassembler, pour revendiquer ou pour exprimer leur mécontentement. Les médias sociaux (blogs, réseaux, partage d'images,...) ont transformé la nature de l'échange entre le politique et le citoyen. Jusqu'alors, les échanges étaient descendants ou ascendants et limité dans l'interactivité, le citoyen pouvait juste s'exprimer par le biais des sondages ou dans l'isoloir. Désormais, la communication est horizontale et interactive, elle repose sur l'échange entre le politicien et son électorat (du moins celui qui fait partie de son ou ses réseaux). Mais les médias sociaux sont aussi des outils de visibilité et de notoriété exceptionnels pour le politicien, ils permettent également de créer une réelle émulation autour de sa personne qui, si elle est bien orchestrée, sera vectrice de voix. Le web 2.0 est citoyen, c'est une évidence ! Le Printemps Arabe, les Indignados, Occupy Wall Street et bien d'autres démarches citoyennes sont parties des médias sociaux. Cependant, encore trop de responsables politiques ne saisissent pas l'importance des médias sociaux, leur influence et leurs enjeux. Peut-être est-ce lié à l'âge des élus ? En France, l'âge moyen des élus de l'Assemblée Nationale est de 55 ans et la grande majorité des Députes (70,36%) se situe dans la tranche d'âge 50-69 ans alors que seulement deux Députés (soit 0,34% des élus) font partie de la Génération Y. Les chiffres ne sont pas fondamentalement différents en Belgique, en Allemagne ou aux Etats-Unis... Les médias sociaux sont amplificateurs de contenus et d'idées, ils doivent servir la communication politique ! Ils sont aussi souvent un excellent indicateur de popularité.

Les limites de la communication politique ou la propagande

Il y a une différence capitale entre la communication politique et la propagande ! Là où la communication politique repose sur une libre adhésion de la cible au message ou sur le choix du public quant aux différents messages qui émanent de plusieurs sources distinctes (les partis politiques), la propagande repose sur un message unique auquel le public n'a d'autre choix que l'adhésion. Clairement, la propagande est un ensemble d'actions de communication qui consistent à endoctriner une population afin de la faire penser ou agir selon des préceptes imposés. La première trace de propagande remonte à la publication, en 1662, par le Vatican de l'ouvrage Congregassio de propaganda fide, un guide de propagation de la foi et des bonnes pratiques du catholicisme. Il s'agit donc de faire une réelle distinction entre la propagande et la communication politique. Cette dernière cesse là où la propagande débute comme ce fut le cas dans de nombreux régimes politiques durant le 20è siècle, de l'URSS à la Chine en passant par le IIIè Reich ou même les Etats-Unis pendant la Guerre Froide (The Voice of America, par exemple). Depuis les années quatre-vingt, les partis politiques ont effacé le mot propagande de leur stratégie car il était trop intimement lié au totalitarisme mais il n'est pas erroné de penser qu'une bonne frange de propagande continue à filtrer à travers la communication politique. Dans une étude empirique qu'ils ont menée aux Etats-Unis dans la seconde moitié des années '80, Noam Chomsky et Edward S. Herman ont proposé un modèle de propagande dissimulée dans la communication politique. Ce modèle consiste à influencer les facteurs de diffusion de l'information (lire à ce propos La Fabrication du Consentement, de Noam Chomsky et Edward S. Herman). A partir du moment où la communication politique se transforme en propagande pure, elle atteint ses limites et cesse d'être de la communication car, au contraire de la propagande, la communication admet la rétroaction. Il faut reconnaitre que, parfois, ces limites sont ténues...

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(1) Communication politique, par Dominique Wolton, on www.wolton.cnrs.fr, consulté le 8 août 2012
(2) Seuls quelque trois millions de personnes sur les sept millions potentielles s'étaient finalement exprimé lors de ce référendum
(3) le terme Spin Doctor ne fut officiellement utilisé pour la première fois qu'en 1984 lors de la campagne qui opposa Ronald Reagan à Walter Mondale mais la fonction fut mise en place sous Roosevelt dans les années '30.
(4) ndlr il faudra attendre 1968 au Canada, 1974 en France et... 2010 en Angleterre qui diffusa pour la première fois un débat politique à la télévision à l'occasion des législatives du 6 mai 2010.

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