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HcoM, le Blog...

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Blog de communication à l'attention de ceux - professionnels ou non et étudiants - qui sont intéressés par la Communication au sens large


Influenceurs, influenceuses... le miroir aux alouettes ?

Publié par Olivier Moch sur 26 Septembre 2022, 09:19am

Catégories : #Relations Publiques

Beaucoup de marques ne jurent que par eux, les ados veulent leur ressembler ou en faire leur métier, ils et elles sont candidats à des émissions de téléréalité, ce sont les nouvelles stars du 21e siècle… Je parle des influenceuses et des influenceurs évidemment. Et pourtant, leur business est de plus en plus controversé, leur éthique aussi.

Une grande partie de la génération Z rêve de devenir influenceur ! Beaucoup 15-30 ans ne jurent que par eux et lorsque l’on demande à un communicant junior (moins de 30 ans et de 5 années d’expérience) d’établir une stratégie de communication pour une entreprise ou un projet, le passage par des influenceurs ou des influenceuses fait systématiquement partie de la proposition ! Cette génération a grandi avec les influenceurs qui ont un réel pouvoir d’effet sur leurs choix de consommation. Une récente enquête menée par Bankrate montre que 49% des personnes ont déjà fait un achat impulsif sous l’influence de message Tik-Tok… pire encore 64% d’entre eux ont regretté au moins un de leurs achats impulsifs ! Ce qui signifie donc qu’ils ont été piégés à plusieurs reprises par des ‘’conseils’’ sur Tik-Tok.

 

L’univers des influenceurs est de plus en plus décrié. Les médias s’intéressent à l’envers du décor qui n’est pas forcément aussi idyllique que l’on veut nous le faire croire. Le 11 septembre dernier France 2 diffusait, dans le magazine Complément d’Enquête, un reportage édifiant qui a mis en avant certaines pratiques du milieu, on y parle notamment de publicités bâclées ou pire encore de publicités mensongères, de mise en danger de la santé de certaines influenceuses opérées par des chirurgiens esthétiques douteux et même d’agressions sexuelles… Un reportage à voir ou à revoir ! Il y a quelques semaines, la RTBF évoquait le phénomène de dropshipping réalisé par certains influenceurs qui consiste à acheter des produits au rabais en Chine, sur des sites de ventes bien connus, et de les revendre avec une très grosse marge bénéficiaire et sans aucune garantie de retour ou de remboursement pour le client.  Le 6 septembre 2022, la Radio Télévision Suisse (RTS) consacrait un long reportage au tremplin vers un ultraconsumérisme exacerbé promotionné par les influenceurs… Au fil des médias, il y a de plus en plus d’articles et de reportages qui remettent en cause le bien-fondé des influenceurs et des influenceuses et de leur pratiques borderline tant en matière d’étique qu’en matière de lois… Bien sûr, toutes les influenceuses et tous les influenceurs ne sont pas à condamner mais ceux qui font correctement et honnêtement le job ne sont pas la majorité, loin s’en faut ! Le réel problème aujourd’hui est que n’importe qui peut s’autoproclamer influenceur et le fait au mépris de toute forme de déontologie et du respect du cadre légal en matière de publicité !

Influenceur/influenceuse : définition

Un influenceur ou une influenceuse est donc, aujourd’hui, une personne très exposée sur les réseaux sociaux qui partage son quotidien avec ses nombreux fans et qui collabore avec des marques qui le rémunèrent pour mettre en avant leurs produits dans le but, évidemment, d’influencer les abonnés ou autres followers à acheter les produits de cette marque…

On distingue quatre grands types d’influenceurs/influenceuses :

  1. Le nano-influenceur : moins de 50.000 d’abonnés cumulés
  2. Le micro-influenceurs : entre 50.000 et 100.000 d’abonnés cumulés
  3. Les macro-influenceurs : entre 100.000 et 1.000.000 d’abonnés cumulés
  4. Le méga-influenceurs : plus d’un million d’abonnés cumulés

Nombreux sont les moins de 25 ans qui sont convaincu que le métier d’influenceurs est récent, qu’il est né au 21e siècle grâce aux réseaux sociaux. C’est une erreur, les natifs numériques n’ont pas inventé l’influence et le métier d’influenceur ! Si le mot n’est apparu dans les dictionnaires qu’en 2017, le modèle existe depuis bien plus longtemps ! Le métier d’influenceur s’est amplifié avec l’apparition des plateformes sociales mais le marketing d’influence est bien plus ancien que les réseaux sociaux.

Des célébrités qui vendent leur nom et leur image à des marques, ce n’est évidemment pas récent. Les premiers influenceurs remontent au début du 20e siècle ; il est communément admis que le premier d’entre eux fut la star du baseball de l’époque, Hognus Wagner, qui, à partir de 1905 devenait l’ambassadeur de marques de tabac, de bières et même d’une célèbre boisson désormais mondialement connue. Cette même boisson qui, dans les années ’20, associa son nom au Père Noël pour faire exploser ses ventes… Quel meilleur influenceur que le Père Noël ??? La popularisation du cinéma a également largement contribué à l’éclosion du marketing d’influence, des stars des années 1920 comme Douglas Fairbanks, Greta Garbo, Louise Brooks ou Buster Keaton, notamment, ont été ambassadeurs des marques dans le but d’augmenter les ventes… Le marketing d’influence a donc plus d’un siècle d’existence. Il a même été théorisé dans les années ’50 par Paul Lazarsfeld et Elihu Katz dans un ouvrage intitulé Personal influence* dans lequel ils remettent en cause l’influence directe des médias sur les comportements du public. Lazarsfeld et Katz établissent ce qu’ils appellent alors la communication à double-étage dans laquelle le message diffusé toucherait la cible finale par l’intermédiaire d’un relais appelé ‘’relais d’opinion’’ ou ‘’leader d’opinion’’… C’est exactement le principe des influenceurs du 21e siècle qui n’ont absolument rien inventé !

 

Influenceurs/influenceuse… un métier codé avec des règles de déontologie et les lois à respecter.

Le métier fait donc rêver une grande partie des moins de 30 ans !Les influenceurs testent des produits gratuitement, font des voyages de rêve, sont invités à des événements sympas, participent à des téléréalités… et parfois gagnent de très grosses sommes d’argent. De plus en plus d’internautes exploitent le filon et, contre rémunération, en espèce ou en produits, vantent des marques à leur communautés d’abonnés sur différentes plateformes sociales. Mais il faut savoir qu’une récente étude menée par l’Agence Reech montre que près des deux-tiers (65% exactement) des demandes de partenariats sont sans rémunération financières… Pas facile de gagner sa vie, dès lors. En fait seulement 15% des influenceurs et influenceuses peuvent vivre pleinement de leur activité. Et seuls ceux que l’on appelle les méga-influenceurs – c’est-à-dire dont la communauté de fans ou followers se chiffrent en millions – peuvent revendiquer des sommes importantes, voire très importantes, pour leurs publications. Pour elles et eux, ces influenceurs et influenceuses, qui vivent largement de leur activité, c’est un véritable travail de fond qui réclame du temps, des compétences techniques et une connaissance des marchés du ou des produits qu’ils promeuvent.

Celles et ceux qui pensent être un influenceur ou une influenceuse parce qu’ils ont un blog, un Instagram avec 5000 followers et qu’une de leur publication à fait un buzz sont dans l’erreur. Cela ne constitue pas une légitimité d’influenceurs ! C’est un métier qui ne s’improvise pas, il répond à des codes et à des règles et beaucoup d’influenceurs et influenceuses ne le savent pas ou ne veulent pas le savoir !

 

En fait, on parle souvent d’un flou artistique légal autour de l’activité d’influenceur. Il est vrai que le législateur ne dit pas clairement : ‘’Influenceur vous avez le droit de faire ça mais vous n’avez pas le droit de faire ceci !’’. Cependant, ce que font les influenceurs et influenceuse c’est clairement du placement de produit… c’est-à-dire de la publicité ! Et là, il y a des règles et des lois très claires ! D’ailleurs le SPF Economie a rappelé à l’ordre une cinquantaine d’influenceurs belges, micro et macro, le 26 juillet dernier. Il ne faut donc pas croire que les contrôles sont inexistants.

Le fisc belge a décidé de remettre un peu d’ordre dans le métier, en tous cas de faire respecter les obligations légales en matière de publicité. Ce qui est dans le collimateur des autorités belges, c’est le manque de transparence des beaucoup d’influenceurs qui ne précisent pas quand ils sont rémunérés par une marque ou quand ils reçoivent des cadeaux d’une marque.

Globalement, quelles sont les obligations légales pour les influenceurs ?

Le Code de droit économique stipule que la publicité doit toujours être reconnaissable comme telle et qu’il faut communiquer de manière transparente et claire au consommateur qu’il s’agit d’un message commercial. A partir du moment où un individu met en avant de façon orale, visuelle et/ou textuelle un produit, un service ou une marque et qu’il reçoit une contrepartie financière ou en nature pour le faire il entre dans le cadre strict de la publicité.

Donc chaque influenceur qui fait la promotion d’un produit ou d’une marque, il doit répondre à 3 obligations légales majeures :

  1. Il doit mentionner clairement, de façon visible, en début de publication le caractère commercial de celle-ci. Les mots ‘’Publicités’’, ‘’Annonce commerciale‘’ ou le désuet ‘’réclame’’ doivent apparaitre de façon très visible !
  2. Il doit aussi identifier la marque ou l’entreprise dont il fait la promotion
  3. En outre, et c’est peut-être le plus important, en tant que créateur de contenu, lorsqu’un influenceur publie régulièrement des messages publicitaires pour des marques, il doit donc nécessairement :
    • S’enregistrer comme entreprise/indépendant auprès de la Banque-Carrefour des Entreprises ;
    • mentionner sur ses pages sur les réseaux sociaux et sur ses sites internet ses données d’entreprise, à savoir : son numéro d'entreprise, l’adresse du siège de son entreprise et une adresse e-mail

Si les influenceurs ne respectent pas cette obligation d’enregistrement, ils sont en violation du Code de droit économique. Leur travail est considéré comme un travail clandestin, qui est évidemment interdit et punissable par la loi.

Le Ministre fédéral de l’Economie, Pierre-Yves Dermagne, précisait, en juillet 2022 que les influenceurs et influenceuses qui ne se mettent pas en règle risquent jusqu’à 80.000 euros d’amende !

 

Personal influence. The part played by people in the flow of mass communication, P. Lazarseld & E. Katz, Glencoe, 1955

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