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Depuis un peu plus d’un an, les articles de presse belges ont nettement moins de visibilité sur Facebook, en tous cas, et quand ils en ont, c’est souvent sans la traditionnelle vignette photo qui accompagne les liens partagés sur la plateforme sociale. Cela s’explique par la loi sur les Droits Voisins entrée en vigueur au mois d’août 2022. En substance, cette loi sur les Droits Voisins contraint Google, Facebook et les autres plateformes digitales qui relaient des contenus de presse à négocier avec les éditeurs de presse une rémunération pour utiliser tout ou partie de leurs contenus : textes, photos, vidéos, graphiques… Une loi qui est évidemment contestée par Meta. En février 2023, Meta et Google ont introduit des recours en annulation de la loi belge qui fixe le droit d’auteur sur les plateformes digitales.
Plus aucun article de presse sur Facebook ?
Au Canada, une étape supplémentaire est même franchie. On ne trouve plus aucun article de presse sur Facebook et Instagram. Effectivement, en juin dernier, les autorités canadiennes ont mis en place une loi – dite C-Eighteen - C18- ou Online News Act - qui contraint les plateformes qui relaient des articles de presse à payer une redevance aux entreprises de presse en leur reversant une partie de leurs revenus publicitaires… une manière indirecte de payer des droits d’auteurs pour la diffusion d’articles de presse. En réaction, depuis le 1er août, Meta a tout simplement bloqué toutes les publications qui contiennent un lien vers un article de presse… Meta estime, en effet, que la plupart des articles de presse sont publiés sur Facebook par les organes de presse, eux-mêmes, et donc qu’il est aberrant de devoir rémunérer ces organes de presse pour des contenus qu’ils postent eux-mêmes sur le premier réseaux social mondial…
Pour les patrons de presse canadiens, Meta bénéficie, depuis des années, gratuitement d’un contenu d’actualité qui est partagé sur sa plateforme et il est donc logique qu’un défraiement soit exigé. Pour Meta, c’est le contraire qui est vrai, ce sont les médias qui bénéficient d’une très grande visibilité pour leurs contenus partagés sur Facebook ou Instagram. Et Meta d’ajouter qu’ils ne sont pas demandeurs de ces articles de presse, que ce sont les utilisateurs qui les diffusent, à commencer par les médias eux-mêmes…
Un bras de fer est donc engagé entre les médias canadiens, pour qui la visibilité sur Facebook était importante, et Meta qui refuse donc de leur donner une tribune s’il faut payer pour la leur donner ! En attendant une éventuelle solution : plus de contenus de médias sur Facebook ou Canada !
Alors, une situation pareille, c’est-à-dire Meta qui bloque tous les articles de presse sur Facebook, pourrait-elle se produire en Belgique ? Pour le moment, on trouve toujours des articles de presse sur Facebook. C’est probablement lié au recours intenté par Meta et Google contre la loi sur les Droits Voisins. Il semblerait aussi que des négociations soient en cours entre les médias et les différentes plateformes (Facebook, Instagram, X, LinkedIN, Google…), pour déterminer une ‘’rémunération adéquate’’ pour les organes de presse. Mais effectivement, si le recours n’aboutit pas ou si un accord autour d’une rémunération adéquate qui satisfasse Meta n’est pas trouvé, alors il n’est pas insensé de penser que le géant américaine applique en Belgique la même politique qu’au Canada et bloque purement et simplement les publications qui dirigent vers des contenus de médias belges.
Ce serait évidemment une réelle perte pour les médias belges. Si SudInfo, Le Soir, L’Avenir, La Libre Belgique, la DH ou autres Trends/Tendances se servent de Facebook pour diffuser leurs contenus c’est qu’ils y ont un intérêt… Un intérêt de visibilité ! Non seulement ces médias ont leur page Facebook mais plusieurs de leurs journalistes relaient aussi des articles via leur profil ou dans des groupes publics. Donc oui, si Meta en arrive au point de bloquer les contenus des médias belges, il leur faudra trouver des moyens de palier à ce déficit important de visibilité pour leurs articles… J’ai entendu le rédacteur en chef groupe de presse francophone bien connu dire que ce ne serait pas si dramatique. Je pense surtout qu’il essayait de s’en convaincre mais qu’il n’en croyait pas un mot ! Selon Xavier Degraux, qui s’exprime dans un article publié sur le site internet du Vif/L’Express, le 8 septembre dernier, la perte de visibilité des articles de presse belges sur Facebook, depuis l’entrée en vigueur de la loi sur les Droits Voisins a entrainé une baisse de trafic de 30% en provenance des réseaux sociaux, Facebook en tête ! Ce n’est pas rien, et à l’heure actuelle, il n’y a pas de blocage total comme au Canada…
Quelles pistes pour remplacer cette perte de visibilité si le blocage devait survenir aussi en Belgique ?
Cela dépend de l’évolution de la situation ! Si Meta bloque les contenus de presse, Google, LinkedIN ou X le feront-ils aussi ou trouveront-ils un terrain d’entente sur cette fameuse ‘’rémunération adéquate’’ ? Pour le moment, ni Google, ni Twitter, ni LinkedIN ne freinent la visibilité des articles de presse en Belgique comme le fait Facebook.
Donc une piste sera, peut-être, de travailler davantage le SEO et le SEA des articles de presse, miser donc un meilleur référencement naturel et payant sur les moteurs de recherches, sur Google en premier lieu si cette plateforme ne bloque pas les contenus de presse. Au Canada, Google vient d’annoncer qu’il examine attentivement la fameuse loi C18 avant de prendre une décision… Si le premier des moteurs de recherches mondial venait aussi à bloquer les articles de presse, ce serait une catastrophe pour les médias ! Mais, en ce qui concerne Google, chez nous, la situation est nettement moins tendue. En effet, depuis avril dernier, Google a mis un place un service baptisé News Showcase qui est une plateforme de curation d’articles de différents médias belges. Un partenariat entre Google Belgique et les groupes médias IPM (qui édite L'Avenir, La Libre Belgique et La DH) mais aussi Rossel (SudInfo et le Soir) et Mediafin (L’Echo) a été mis en place et garantit aux médias partenaires d'être rémunérés pour une sélection de contenus enrichis relayés par le géant américain.
LinkedIN... trop sous-estimé par les quotidiens francophones belges !
Se concentrer sur X et LinkedIN, toujours en partant du postulat que ces plateformes ne suivent pas Facebook en cas de blocage, serait une autre possibilité. Je suis toujours assez surpris que, à l’heure actuelle, les médias francophones belges snobent fortement LinkedIN… Sudinfo, par exemple, n’a que 3000 abonnés et n’a partagé que 5 publications sur sa page LinkedIN sur les deux derniers mois… et encore, il n’y a qu’un seul lien vers un article de Gaspard Grosjean qui revient sur le rachat des filiales de Nethys. Mais les autres ne font pas mieux. La Libre Belgique n’a qu’une page morte où pleurent 155 abonnés, pour la DH et L’Avenir c’est le désert… Seuls Le Soir et l’Echo, finalement, ont une vraie politique de partage d’articles sur LinkedIN et s’offre, avec respectivement 12.000 et 16.000 abonnés, une belle tribune de visibilité !
Dernière piste possible s’il faut compenser une perte de visibilité suite à un blocage des articles de presse par Facebook, le lien direct avec le lecteur… c’est-à-dire ramener le lecteur directement sur les articles en ligne via de meilleurs newsletters ou de meilleurs mailing.