Fear Of Missing Out, la peur de manquer quelque chose, est un symptôme clair de l'addiction aux médias sociaux...
C'est enfoncer une porte ouverte que d'écrire que les médias sociaux prennent de plus en plus de notre temps. Le Belge passe 13h36' par semaine sur internet dont 4h54' (soit 36%) sur les réseaux sociaux(1). C'est un peu en dessous de la moyenne européenne mais ce temps passé sur les médias sociaux est en croissance constante, il a augmenté de 34% entre 2009 et 2012. En parallèle à cette croissance de l'utilisation du net et des médias sociaux est née une forme de trouble psychologique baptisée cyberdépendance par les psychologues. Cette addiction se traduit par un sentiment d'euphorie lié à l'utilisation d'internet, un besoin constant d'augmenter le temps passé sur le net au détriment de la vie réelle et des contacts avec la famille ou les amis, des problèmes de performances au travail ou à l'école mais aussi une de l'irritabilité voire de la dépression lors d'une privation prolongée d'un accès au net. Sans aller jusqu'à la cyberdépendance, les réseaux sociaux ont généré, pour leur part, un vrai phénomène d'angoisse : la peur de manquer quelque chose ! Tristement baptisé FOMO (l'acronyme de Fear Of Missing Out - Peur de manquer quelque chose), ce phénomène était surtout constaté chez les plus jeunes utilisateurs des réseaux sociaux mais c'est très vite étendu à l'ensemble des couches d'utilisateurs. Les médias sociaux offrent une multitude de "possibles", c'est à dire des événements, petits ou grands, auxquels on pourrait prendre part. Les profils d'amis distillent quantité d'événements auxquels on n'aurait pas forcément pensé, desquels on n'aurait pas entendu parler, mais auxquels on se verrait quand même bien participer. Il n'est pas rare de trouver, sur Facebook par exemple, cinq, huit ou même dix événements pour les jours à venir ou le week-end suivant. Il est évident qu'il est impossible d'assister à chacun de ces événements : le vernissage de cette expo unique, les 40 ans d'un ami d'école, la rencontre-citoyenne sur la mobilité dans le quartier ou la dégustation de vins sud-africains dans un resto branché, que choisir ? Choisir, c'est renoncer ! L'adage n'est pas nouveau, devoir faire des choix de soirées ou d'événements n'est pas un phénomène né avec les médias sociaux mais avant le web 2.0, l'on posait surtout des choix en fonction de ses attentes, de ses goûts ou de ses envies. Désormais, avec cette peur de manquer quelque chose, le choix est plus difficile à poser. L'idée n'est plus d'assister à l'événement le plus en phase avec nos goûts ou nos attentes mais bien à l'événement où il est susceptible de se passer quelque chose que l'on regretterait d'avoir manqué ! L'internet mobile a encore renforcé ce sentiment de manque car il est désormais possible, par les statuts ou les nouvelles postés en temps réel, de voir ce que font des contacts. Je suis au vernissage de l'expo mais Jean et Martine sont aux 40 ans de l'ami d'école et les photos qu'ils viennent de poster montrent qu'ils s'amusent plus que moi... La peur de manquer quelque chose doit être définie plus précisément encore en peur de manquer quelque chose de mieux que ce que l'on fait actuellement.
Le syndrome FOMO s'étend bien au-delà des événements que l'on pourrait manquer ! Il s'installe désormais autour de l'information que l'on pourrait manquer si l'on n'est pas devant son écran au moment ou elle passe. Le besoin d'attraper au vol la meilleure information afin de savoir ce qui se passe mais aussi afin d'être parmi les premiers - voire le premier - à partager l'info. Alors, par sécurité, on consulte souvent ses réseaux sociaux, on rafraichit fréquemment la page au cas où et l'on est connecté par différents canaux, via le pc (au travail ou à la maison), via le smartphone et/ou va la tablette... La cyberdépendance n'est pas loin ! Deux "risques" majeurs se dégagent d'un comportement lié à la peur de manquer quelque chose. Le premier est de ne plus être capable, devant la multiplication des possibilités, de poser des choix, y compris dans la "vraie" vie. Le second est, paradoxalement, de manquer quelque chose à force de rester concentré devant son écran afin d'attendre l'hypothétique événement encore mieux ou la possible information juteuse à partager. Je n'irai ni au vernissage de l'expo unique ni aux 40 ans du pote d'école où Jean et Martine semblent pourtant s'amuser parce que Paul postera peut-être la photo d'une soirée géniale où je pourrais éventuellement aller...
Les médias sociaux prennent de plus en plus de place dans nos vies quotidiennes, ce sont des outils de communication fabuleux mais comme pour tous les outils une formation au maniement n'est peut-être pas inutile !
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(1) Le Belge est de plus en plus sur internet, par Etienne Froment, on geeko.lesoir.be, 27 août 2012
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Peur de manquer quelque chose
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