Parce qu'il faut garder à l'esprit qu'il existe des règles en matière liberté d'expression et qu'il s'agit d'en tenir compte lorsque l'on publie certains contenus sur les réseaux sociaux.
Les médias sociaux ne sont pas une zone de non-droit ! Selon la loi du 11 mars 2003, sur base d'une directive de l'Union Européenne, les médias sociaux sont des hébergeurs purement passifs, leur rôle se limite à un stockage d'informations c'est à dire qu'ils sont présumés ne pas avoir connaissance de ce qui se passe, s'échange, sur leur plateforme. Ils n'ont, à la base, aucune obligation de contrôle sur les contenus diffusés via leur plateforme, ils ne peuvent donc pas être tenus pour responsables des contenus postés par les utilisateurs. Cette exonération perdure tant que l'hébergeur n'est pas informé des contenus postés; s'il en a connaissance, il doit agir rapidement pour supprimer les contenus illicites. La responsabilité des contenus engagent donc, en priorité, celui qui poste ces contenus ! Si la Convention Européenne des Droits de l'Homme, à travers son article 10, garantit la liberté d'expression, cela ne signifie pas que cette liberté soit totale et illimitée. La liberté d'expression n'est pas un droit absolu, elle est limitée, notamment, par la sécurité nationale, l'intégrité territoriale, la sûreté publique ou encore la protection de la réputation et des droits d'autrui. Des sanctions sont prévues pour qui outrepasse ces limites. Les médias sociaux sont des espaces privés ouverts au public, c'est à dire que ma page Facebook, par exemple, m'appartient mais qu'elle est ouverte au public que j'autorise à la fréquenter. Cela signifie clairement que tous les propos tenus sur les médias sociaux sont publics ! Dès lors, sont considérés comme illicites tous les propos qui portent atteinte à l'honneur, à la vie privée ou à la réputation d'une personne, les injures ciblées, la diffamation ainsi que les propos qui incitent à la haine raciale ou à la xénophobie ou qui font l'apologie de crimes contre l'humanité.
Assimilé au délit de presse
Un délit de presse est constitué par la diffusion de propos illicites (voir plus haut) par voie de presse. Désormais, depuis deux arrêts rendus par la Cour de Cassation en date du 6 mars 2012, les propos tenus sur internet sont assimilés à des délits de presse, ce qui est logique puisque le net est un média. Cela signifie donc que les utilisateurs de médias sociaux (réseaux, blogs, partage d'images...) sont soumis aux règles en vigueur relatives au délit de presse. Cela signifie aussi qu'en cas de dérapage, les blogueurs et autres réseauteurs, même s'ils ne sont pas journalistes, peuvent être poursuivis en cour d'Assise. Les propos qui relèvent du racisme ou de la xénophobie sont eux jugés au pénal, toujours à l'image du délit de presse.
En substance lorsque l'on poste un contenu sur les médias sociaux, soit on exprime une opinion soit on évoque un fait.
Si l'on exprime une opinion : celle-ci ne peut, en aucun cas, prendre la forme d'une injure, d'une diffamation pas plus qu'elle ne peut porter atteinte à l'honneur ou à la réputation d'une autre personne. Cette opinion doit respecter les droits d'autrui sous peine d'être poursuivi en cour d'assise. Elle ne peut, en aucun cas, être porteuse d'un message à caractère raciste, xénophobe ou vanter des crimes contre l'humanité sous peine d'être poursuivi au tribunal correctionnel.
Si on évoque un fait : le contenu doit rester factuel et tendre vers la vérité.
Le troll, c'est à dire le fait de tenir des propos excessifs et/ou hyperboliques dans le but d'entretenir une polémique, est toléré tant qu'il reste dans les limites de la liberté d'expression.
Quel tribunal compétent ?
Les médias sociaux sont soumis aux règles du droit du pays de l'hébergeur, ainsi Facebook, Twitter ou LinkedIn sont des sociétés de droit américain qui répondent donc au droit américain; Viadeo ou Canalblog sont des sociétés installées en France et soumises au droit français. Cependant, des dommages causés par internet, injures, atteinte à l'honneur, diffamation, etc. peuvent être jugés par des tribunaux d'un autre pays dans lequel une personne serait victime de ces dommages. Cela signifie qu'un tribunal belge, par exemple, peut être compétent pour juger un dommage subit par un citoyen belge via une page Facebook, Viadeo ou Twitter, à la double condition que :
- le média social utilisé soit accessible en Belgique;
- la victime ait ses intérêts en Belgique ou que le contenu litigieux soi destiné à un public belge.
Quelques cas concrets :
* Les propos tenus sur Facebook par trois fans de Johnny Hallyday à l'encontre de DR Delajoux en 2009 ont été jugés par le Tribunal de Grande Instance de Paris en février 2013.
* un Facebooker a été condamné par le Tribunal Correctionnel de Brest, en octobre 2010, à trois mois de prison et 1200 euros d'amende pour avoir insulté sur son mur des gendarmes qui venaient de le contrôler.
* Le Tribunal Correctionnel de Tournai a poursuivi, en juin dernier, une jeune femme qui a harcelé et porter atteinte à l'honneur de sa belle-mère sur Facebook.
* Durant l'été 2012, deux Suisses du canton de Vaud ont été condamnés à des amendes pour avoir insulté d'autres personnes sur Facebook. Ainsi l'insulte "grosse merde" a valu 150 francs suisses d'amende et un sursis de 1000 francs suisse à son auteur; l'insulte "grosse pute" a été sanctionnée de 450 francs suisses d'amende et d'un sursis de 1500 francs suisse.
* Le Tribunal du Travail de Louvain a jugé juste, en novembre 2011, le licenciement d'un travailleur qui avait critiqué son employeur sur Facebook.
* En juin 2013, la Cour d'Appel de Paris a débouté Twitter qui avait été en appel de son obligation de communiquer les informations relatives à l'auteur de tweets racistes et antisémites à diverses associations des droits de l'homme qui entendent saisir la justice.
Clairement, les propos qui sont tenus sur les médias sociaux engagent ceux qui les publient. A certaines conditions, liées au nombre de personnes qui ont accès à la page notamment, les médias sociaux peuvent être appréciés comme espaces privés mais la règle veut que Facebook, LinkedIn, Twitter, les blogs et autres médias sociaux sont des espaces assimilés à des lieux publics, que les contenus qui y sont publiés sont donc publics. Réfléchissons-y avant de publier certains contenus !
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